3 mars 2007
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Adeline Giustinati-Miermont vient de publier De chair et de chimères chez La Bruyère Editions.
Son premier ouvrage...
Qui publie pour la première fois connaît et l'émoi de l'entrée dans le cercle des auteurs authentiques, ceux dont le nom sert de repère à un objet-livre– son recueil à elle s'avance sous une couverture de masque blanc, de masque neutre d'initiation au statut de choryphée –, associé au titre qui porte leur espoir, et l'épreuve du doute sur l'accueil réservé à ces phrases qu'il fallut tant de temps pour écrire et qu'il suffit de quelques moments pour lire...
Que de handicaps à surmonter maintenant pour elle :
-Les règles cruelles du compte d'auteur qui laisse trop souvent l'auteur pour compte ;
-Le tricotage patient de la diffusion, plus meutrier pour les doigts que le cal de la plume ;
-Les jugements bâclés des critiques, qui faute de pouvoir en écrire autant se bornent à rentabiliser leur stage de lecture rapide pour produire, en sautant à rebours du sommaire à la préface, via les pages 69 – si elle existe– et 13, pour y trouver les cinq phrases et surtout la citation qui feront leur recension ;
-L'indifférence polie des autres poètes, plus préoccupés de relire leurs textes que de jeter un œil sur l'œuvre de leurs consœurs et confrères, et gémissant sur le massacre de forêts engendré par l'appétit de reconnaissance de leurs concurrents ;
-La sollicitude des amis, qui ne voient pas pourquoi il leur faudrait en plus payer le recueil qui va orner leur bibliothèque, et se le font offrir en ajoutant l'attente d'une dédicace forcément personnalisée – j'ai trouvé dans des bouquineries, et aussi en vente dans le e-commerce, nombre de plaquettes ainsi adornées d'envois d'auteur, et visiblement non lues, comme en atteste l'absence de découpe, pour les éditions anciennes, ou pour les plus récentes l'état encore craquant d'une brochure calculée au juste prix, donc irréversiblement cassante.
-Le tricotage patient de la diffusion, plus meutrier pour les doigts que le cal de la plume ;
-Les jugements bâclés des critiques, qui faute de pouvoir en écrire autant se bornent à rentabiliser leur stage de lecture rapide pour produire, en sautant à rebours du sommaire à la préface, via les pages 69 – si elle existe– et 13, pour y trouver les cinq phrases et surtout la citation qui feront leur recension ;
-L'indifférence polie des autres poètes, plus préoccupés de relire leurs textes que de jeter un œil sur l'œuvre de leurs consœurs et confrères, et gémissant sur le massacre de forêts engendré par l'appétit de reconnaissance de leurs concurrents ;
-La sollicitude des amis, qui ne voient pas pourquoi il leur faudrait en plus payer le recueil qui va orner leur bibliothèque, et se le font offrir en ajoutant l'attente d'une dédicace forcément personnalisée – j'ai trouvé dans des bouquineries, et aussi en vente dans le e-commerce, nombre de plaquettes ainsi adornées d'envois d'auteur, et visiblement non lues, comme en atteste l'absence de découpe, pour les éditions anciennes, ou pour les plus récentes l'état encore craquant d'une brochure calculée au juste prix, donc irréversiblement cassante.
Tout premier recueil est pour moi promesse obscure mais déjà chaude d'une écriture.
Premier pas dans l'univers inconnu de la littérature.
Début d'un travail de reconstruction du monde qui réussira si la patience sait s'allier à la fougue, la force des mots à la compassion des émotions, la rigueur jubilatoire du désir de communiquer à la souplesse protectrice de l'éthique grammaticale.
Premier pas dans l'univers inconnu de la littérature.
Début d'un travail de reconstruction du monde qui réussira si la patience sait s'allier à la fougue, la force des mots à la compassion des émotions, la rigueur jubilatoire du désir de communiquer à la souplesse protectrice de l'éthique grammaticale.
J'ai en commun avec Adeline Giustinati-Miermont l'intérêt pour le Français Langue Étrangère. Nous fréquentons tous deux le forum de Franc-Parler.
Mon intérêt pour cette discipline est que, nul n'étant prophète en son pays, et surtout pas le poète en sa langue, il est un détour profitable qui consiste à considérer que la langue du poème n'est point la langue maternelle du lecteur, usée qu'elle est par l'indifférence née de l'usage et enfouie dans les limbes de son inconscient, et qu'il convient de traiter dans le texte chaque mot comme nouveau, chaque tournure comme exotique ou dérangeante, chaque allusion comme référencée à une culture qui serait à faire découvrir.
La chimère est un être de mélange, parfois qualifié de monstrueux, puisqu'il faut le montrer pour en prouver l'existence. L'androgyne est chimère. Le mental humain, animus et anima entrelacés, est chimère. Des symboles maclés composent une chimère de significations. Le poème lui même, au delà de certaines figures du discours, n'est-il pas est chimère, qui veut à la fois être objet transmissible et quintessence d'émotion.
Mon intérêt pour cette discipline est que, nul n'étant prophète en son pays, et surtout pas le poète en sa langue, il est un détour profitable qui consiste à considérer que la langue du poème n'est point la langue maternelle du lecteur, usée qu'elle est par l'indifférence née de l'usage et enfouie dans les limbes de son inconscient, et qu'il convient de traiter dans le texte chaque mot comme nouveau, chaque tournure comme exotique ou dérangeante, chaque allusion comme référencée à une culture qui serait à faire découvrir.
La chimère est un être de mélange, parfois qualifié de monstrueux, puisqu'il faut le montrer pour en prouver l'existence. L'androgyne est chimère. Le mental humain, animus et anima entrelacés, est chimère. Des symboles maclés composent une chimère de significations. Le poème lui même, au delà de certaines figures du discours, n'est-il pas est chimère, qui veut à la fois être objet transmissible et quintessence d'émotion.
Le peu que j'ai pu lire de son travail me pousse à croire qu'elle saura surmonter les handicaps, plus haut énumérés d'un trait point trop noir même si acide, et qui servent aujourd'hui de Conseils à un jeune poète. Et qu'elle a aussi les ressources requises pour réussir cette nécessaire reconstruction mot à mot du monde des sens qu'est la poésie.
Et si je lui laissais la parole ? Pour cette méditation profane sur l'épaisseur du présent...
J'abandonne
Les bras ballants
Mets le présent en attente
Je m'abandonne
A des délices sucrés
Sur des épaules salés
Quelle ivresse!
Mon amant me peint un soleil sur les lèvres
Partition de baisers qui fondent sur la nuque
Je m'abandonne
A des caresses ardentes
Chapelle de l'instant
De l'abandon
Sanctuaire de l'éphémère
Mémoire de la chair
Quand s'éclipse mon amant
Quand l'extase file entre les doigts
Je me trouve à genou
Au pied du présent
Un tissu de grâce dans une des mains
Les bras ballants
Mets le présent en attente
Je m'abandonne
A des délices sucrés
Sur des épaules salés
Quelle ivresse!
Mon amant me peint un soleil sur les lèvres
Partition de baisers qui fondent sur la nuque
Je m'abandonne
A des caresses ardentes
Chapelle de l'instant
De l'abandon
Sanctuaire de l'éphémère
Mémoire de la chair
Quand s'éclipse mon amant
Quand l'extase file entre les doigts
Je me trouve à genou
Au pied du présent
Un tissu de grâce dans une des mains
Si le corps y est présent dans d'essentielles parties : doigts, mains, bras, épaules nuque, genou, pied, traçant tout un itinéraire, les postures sont elles aussi parallèlement évoquées dans une gamme de sensations : abandon, attente, ivresse, caresse, extase, grâce qui toutes colorent à leur manière l'épaisseur d'un atome de mémoire du temps : présent, instant, éphémère, éclipse, filage....